Quand le jeunisme devient âgisme...
Au sujet du rapport "Reconnaître, valoriser, encourager l’engagement des jeunes"
mercredi 24 juin 2015
par webmaster

L’Observatoire de l’âgisme a lu avec intérêt le récent rapport présenté au ministre de la Ville, intitulé "Reconnaître, valoriser, encourager l’engagement des jeunes".

Il partage avec les auteur-e-s de ce rapport un grand nombre de constats sur la faiblesse des dispositifs permettant de soutenir toutes les formes d’engagement et d’actions portées par les plus jeunes d’entre nous – très souvent victimes, comme les plus vieux d’entre nous, de formes plus ou moins insidieuses d’exclusion.

Il partage donc évidemment le souhait, plus qu’indispensable, de mettre fin à toutes les formes de discriminations dont les jeunes sont victimes. Dans le domaine politique, parmi les propositions, plusieurs permettraient en effet de mettre fin à des inégalités (par exemple, aligner l’âge pour le droit d’éligibilité au Sénat à 18 ans sur les conditions applicables à l’élection des députés), voire à des dispositifs âgistes (actuellement, par exemple, en cas d’égalité de suffrages, le plus âgé des candidats est élu). Retenons également la judicieuse proposition d’abaisser l’âge d’exercice du droit de vote à 16 ans.

L’Observatoire de l’âgisme s’inquiète en revanche d’un esprit âgiste qui sous-tend l’ensemble du rapport, où les intérêts des jeunes et des vieux sont presque toujours opposés et où le regret, légitime, de la faible présence de jeunes dans certains domaines s’accompagne quasi systématiquement d’une vision négative de la part des plus âgés, comme si le problème était un problème d’âge et non un problème d’absence d’égalité entre les générations. De cette vision très partiale témoigne par exemple la proposition, en cas d’égalité de suffrage, de ne plus choisir comme aujourd’hui le candidat le plus vieux mais... de choisir le plus jeune. Ce choix n’a pas plus de légitimité que l’autre...

Enfin, l’Observatoire de l’âgisme ne peut que déplorer, et trouver même plus que choquante, la proposition "d’une limite d’âge maximal pour se présenter à un mandat parlementaire ou d’élu local" ( "La mesure consisterait à interdire de candidater pour un mandat électif après 70 ans" ). Faut-il rappeler aux auteur-e-s du rapport que la discrimination fondée sur l’âge ne se justifie pas plus que celle fondée sur le genre, ou la couleur de peau, ou la religion, etc. ?

Voilà donc des auteur-e-s qui trouvent aberrant qu’on ne puisse se présenter au Sénat avant 24 ans mais qui trouveraient absolument normal qu’on ne puisse plus s’y re-présenter après 70 ans... Remplacer une forme d’âgisme par une autre, une inégalité par une autre... ne permettra pas d’avancer bien loin dans le combat pour l’égalité de tous les citoyens, quel que soit leur âge.

Post Scriptum :
La question d’un âge limite est d’autant plus absurde que la nécessité d’éviter la professionnalisation de la vie politique peut s’obtenir en limitant (comme le proposent d’ailleurs les auteur-e-s de ce rapport) le cumul des mandats dans le temps. De telles limites, par exemple à deux ou trois mandats consécutifs, suffisent en effet à lutter contre cette professionnalisation sans que la question de l’âge (quel qu’il soit) des candidats que choisissent librement les électeurs ne devienne un critère d’exclusion.
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